En janvier 2023, je publiais sur Soi-esprit une brève intitulée : « Le droit de réponse s’applique-t-il aussi à la pédagogie Waldorf-Steiner ? »
 
En effet, il faut constater que dans la plupart des cas les journalistes et éditeurs ne donnent strictement aucune suite aux demandes de rectifications et de droits de réponses, pourtant légitimes, émanant d’écoles Steiner ou de représentants de la pédagogie Steiner.
 
Nicolas Tavernier, président de l’Association nationale pour la promotion et l’avenir de la pédagogie Steiner-Waldorf (ANPAPS) a en partagé l’amer constat sur le site de l’ANPAPS.
 
Un reportage de France 2 diffusé au 20h du 3 novembre 2022 constitue à lui seul une espèce de sommet d’inexactitudes et de diffusion de contenus propres à créer et entretenir des préjugés gravement préjudiciables aux écoles Waldorf-Steiner, aux parents et in fine, aussi aux enfants.

Confronté une fois de plus à un refus d’accorder un droit de réponse, l’ANPAPS a introduit une saisine auprès du CDJM, le Conseil de Déontologie Journalistique et de Médiation, fondé en décembre 2019. Le CDJM a adopté un avis au sujet de cette saisine le 11 avril, lequel avis a été publié le 11 mai 2023. Le CDJM déclare que la saisine introduire par l’ANPAPS est partiellement fondée (ce qui signifie qu’il considère que certaines règles de déontologie n’ont pas été respectées).
 
Le résumé de son avis publié sur son site web est le suivant (saisine 23-010) :

« France 2 // Reportage sur les écoles hors contrat et la pédagogie Steiner-Waldorf - Saisine déposée par ANPAPS le 24 janvier 2023, avis publié le 11 mai 2023
Cette saisine porte sur un reportage diffusé par France 2 lors du JT de 20 h du 3 novembre 2022, dans la séquence « L’œil du 20 h ». Il est repris sur le site de la chaîne, sous le titre « Méthode Steiner : des écoles hors contrat sous surveillance ». Le requérant, l’Association nationale pour la promotion et l’avenir de la pédagogie Steiner-Waldorf (ANPAPS), dénonce des erreurs et l’absence de leur rectification, ainsi qu’un manque d’équité dans le traitement du sujet. Le CDJM estime que, bien que France 2 ait respecté l’obligation déontologique d’exactitude sur plusieurs points soulevés dans la saisine, le média a enfreint cette règle pour trois d’entre eux. Il considère aussi que les obligations d’équité et de vérification des faits n’ont pas été respectées. Enfin, lorsque la chaîne a été mise au courant des erreurs commises, elle n’a pas respecté l’obligation déontologique de les rectifier.
La saisine a donc été déclarée partiellement fondée ».

L’avis complet peut être consulté ici : https://cdjm.org/avis-23-010
 
Au moment de publier la présent brève, nous présumons que France 2 ne sera pas dans l’obligation de respecter les règles enfreintes et d’effectuer des « publications rectificatives ». En Belgique, les médias sont tenus à des publications rectificatives ou à respecter le droit de réponse, dans des cas analogues.

Addendum du 19 mai 2023 : lire le communiqué de l'ANPAPS sur son site à la suite de la saisine du CDJM : Victoire de l’ANPAPS face à France 2, devant le CDJM.

 
À notre sens, l’action entreprise par l’ANPAPS montre au moins deux choses :

• Les citoyens et institutions lésés par des propos calomniateurs ont la possibilité de faire entendre leur voix auprès d’organismes tiers qui peuvent utilement les éclairer, voire les aider… (même lorsque confrontés à des médias ou organismes puissants,… même en France ! 😉). Comme nous le mentionnions dans cette brève (« Les Écoles Steiner-Waldorf sont aujourd'hui menacées par des attaques incessantes »), la plupart de ces organismes, dont on trouve des équivalents dans nombre de pays (voir ici :https://cdjm.org/ailleurs-dans-le-monde/ ), oeuvrent de manière rigoureuse et professionnelle. Leurs prises de position peuvent s’avérer précieuses pour les citoyens souvent démunis que nous sommes.
• Il n’y a aucune raison de principe et aucune excuse de ne pas le faire. Se taire face aux mensonges, aux dénigrements voire aux appels à la discrimination et à la haine, c’est contribuer très activement soi-même à laisser croître sans fin ces comportements aux effet toujours plus destructeurs. Bravo à l’ANPAPS qui s’est au contraire montrée pro-active ! (voir aussi au sujet de cette thématique une des situations à laquelle a été confrontée Rudolf Steiner : Développer une sensibilité pour la boule de neige qui provoquera une avalanche, alors que la volonté existe de tuer l’anthroposophie).
  

Au sujet des conséquences du silence et l’immobilisme face aux mensonges :  Je les ai vécues «dans ma chair» et j'en sais donc quelque chose. Pendant 5 ans environ, entre 1999 et 2004, alors que je travaillais dans une école Waldorf-Steiner en Belgique francophone, avec quelques collègues, nous avons dû déployer une énergie extrêmement considérable à la suite d’accusations mensongères portées quelques années auparavant sur la pédagogie Waldorf et Rudolf Steiner, par un journaliste réputé dans le chapitre d’un de ses livres. Nous avons dû travailler pendant une demi-décennie pour rectifier l’image déformée et délétère qu’il avait ainsi inventée de toute pièce. Ces mensonges n’ayant pas été contestés au moment opportun et de manière adéquate, pendant des années des familles ont été victimes de diverses stigmatisations ou ségrégations (par exemple des refus de la part de propriétaires de leur louer un logement, sur base du préjugé d’appartenance à une secte ; ou encore, en cas de séparations au sein de couples, il arrivait fréquemment que les avocats d’une des parties utilisent la scolarisation des enfants du couple dans l'école Waldorf, pour réclamer le droit de garde exclusif, arguant du caractère (soi-disant) sectaire de l’école).  Mes collègues et moi avons dû faire face à bien d’autres difficultés encore (y compris des tentatives issues des autorités en vue de faire fermer l’école, sur base de prétextes fallacieux). Ces difficultés sont précisément recherchées par les calomniateurs et manipulateurs qui répandent tous ces propos faux, qu’ils soient journalistes ou non (y compris parfois des institutions gouvernementales !). Après plusieurs procès gagnés en justice ainsi que des négociations ayant abouti à des résultats probants avec le Gouvernement, nous pûmes enfin sortir de cette période cauchemardesque.  Depuis cette époque je considère, que les « responsables » d’organisations qui se murent dans le silence, l’inaction et l’immobilisme face à des atteintes aussi graves à la réputation d’enfants, de familles et d’institutions pourtant tout à fait respectables, se montrent dans les faits particulièrement irresponsables et incompétents dans l’exercice de certaines de leurs fonctions et attributions. Dans de tels cas il faut ,dès que possible et sans états d’âme, prendre des mesures pour que des personnalités plus compétentes qu’elles dans ces problématiques spécifiques, puissent être en mesure de les prendre en charge.

Stéphane Lejoly